La médiation nous amène à constater une révolution dans la manière de régler les conflits.
Voici que nous devenons autonomes, conscients de notre capacité à résoudre nous-mêmes nos conflits. Nous étions jusqu’ici dans une situation de dépendance à l’égard de l’institution judiciaire vers laquelle nous courrions pour régler nos litiges. Cette émancipation qui se profile à l’avenir marque le passage d’une communication « parent-enfant », à une communication « adulte-adulte ». Elle est promesse d’avènement d’une ère nouvelle où chacun devient responsable de lui-même, de son avenir et des liens qu’il souhaite tisser avec l’autre, dans un rapport d’altérité.
Nous nous réapproprions le pouvoir de gérer le cours de nos vies et découvrons, ce qui manque le plus à nos sociétés occidentales et individualistes, le sens de la solidarité et de la collectivité : la médiation nous amène désormais à prendre nos décisions en commun, dans le respect mutuel et l’intérêt de tous. Et, dans cette ouverture à l’altérité, nous devenons artisan de paix.
La médiation nous contraint à vivre le moment présent et à faire un bilan du passé. L’Occident est peu enclin à cet arrêt du temps, et à ce retour sur le chemin parcouru. A courir après le futur, nous oublions de vivre le présent. La médiation nous amène à une réflexion sur notre relation au temps et à notre manière de la vivre.
Elle invite aussi à revoir l’essence de nos institutions judiciaires. On a longtemps confondu but et moyen. On réalise aujourd’hui que le but suprême de la Justice n’est
pas de dire le droit, ni de trancher les litiges. Ce ne sont que des moyens. La Justice doit tendre à contribuer à la paix sociale. Jusqu’ici, les juges avaient un moyen : le droit. Ils ont maintenant un deuxième outil, la médiation.
Certains pays prônent la médiation préalable obligatoire avant la saisine du juge. Samise en place constituerait un pas vers la construction d’un véritable droit à la médiation. Nous devrions avoir droit à l’accès à la médiation, comme on a droit à l’accès au droit.
Cette mesure est appelée à un bel avenir. Cela suppose, au préalable, un changement de nos mentalités, mais comme le disait Einstein, il est plus facile de provoquer la fission de l’atome que de changer les mentalités.
Béatrice Brenneur